lundi 7 novembre 2022

Le Paratonnerre Chronique Premier Miracle T.1 & T.2

Le paratonnerre a complété son interview à la suite de la sortie du T.2, 
à lire dans la la foulée de la précédente.

Olivier Brazao : L’aventure « Premier miracle »

Brieuc Cudennec

En 2016, l’écrivain Gilles Legardinier publie Le Premier miracle " . Véritable récit de suspense et d’aventures, le roman a une nouvelle fois prit vie avec son adaptation en bande dessinée (Tome 1) fin 2021 (et avec le tome 2 fin 2022). Didier Convard en est le scénariste et Olivier Brazao en est le dessinateur. Transposer l’écriture en images est une véritable réflexion. Que doit-on conserver Que doit-on apporter Olivier Brazao répond à nos questions.



Comme pour la série Sheewõwkees, vous êtes associé à une bande dessinée qui mêle fantastique et mythes. Sont-ce des univers qu’il vous plaît d’explorer ?

C’est un concours de circonstance... Ceci dit j’aime bien... Je suis plus à l’aise dans le contemporain, enfin c’est ce qui me plait le plus à l’heure actuelle, donc mêler du fantastique, du mythique... dans notre époque me plait bien. Ce qui est assez marrant, c’est que pour les Sheewõwkees j’ai travaillé avec Thomas Mosdi qui a été le collaborateur et disciple de Didier Convard. On boucle la boucle si on peut dire.


Mettre en images le roman de Gilles Legardinier a-t-il été complexe ?

Lorsque j’ai lu le roman, je me suis fait mes propres images, personnages, lieux... Du coup j’ai eu moins d’appréhension lorsque je me suis attelé aux planches. Je savais que j’allais devoir inventer des lieux que l’on ne peut pas visiter, dont il n’existe pas de photos, dessins, gravures..., comme le kofun au Japon ou bien encore le tombeau en Egypte. Ça fait partie des choses agréables et compliquées à faire, car il faut certes inventer mais que cela soit crédible et réaliste. C’est un chouette défi que de jongler entre création et des lieux existants... Ce jeu d’équilibre me plait bien.



Vous a-t-il conseillé ?

Gilles a été disponible pour me décrire certains lieux qu’il avait pu visiter lors de ses recherches au moment de l’écriture du roman, comme le laboratoire au sein de la British Library de Londres qui n’est pas ouvert au public. Bien qu’allant régulièrement en Angleterre et à Londres je connais pourtant bien les lieux mais pas cette partie de l’édifice. C’était la période du premier confinement, du coup Gilles me l’a décrit au téléphone. À partir de là, j’ai fait une reconstitution tout en gardant des libertés.

Sinon pour le reste de l’album Gilles ne m’a pas imposé quoi que ce soit, nous avons juste décidé avec Didier de respecter la vision qu’il avait de son héroïne, car je ne la voyais pas du tout comme lui. C’est la seule « contrainte » que j’ai pu avoir.


Didier Convard, le scénariste, est lui-même dessinateur et maître du genre. Comment avez-vous travaillé ensemble ?

Didier, c’est approprié le roman et a fait un travail remarquable d’adaptation. Il a su en garder l’esprit, l’ambiance, l’humour
tout en arrivant à faire tenir l’histoire 
dans un diptyque. J’ai été épaté... Sinon pour en revenir à notre mode de travail ,Didier a écrit le premier tome et j’ai pu lui faire quelques remarques, mais rien de bien majeur. Il m’a donné carte blanche pour pour la mise en scène, j’ai pu ajouter des cases ou en compiler... Il est vraiment à l’écoute de son dessinateur. J’avoue qu’au départ, je ne savais pas à quel sauce j’allais être mangé entre Gilles Legardinier l’auteur du best-seller du « Premier Miracle » et Didier Convard l’adaptateur et scénariste de renom. Ils ont été supers et dispos tout les deux lorsque j’avais besoin de doc, visuels, explications... C’est vraiment très agréable comme collaboration.



La bande dessinée passe de la pleine nature à l’univers des grandes villes jusqu’aux temples aztèques et égyptiens. Est-ce ce fut une difficulté de passer de l’un à l’autre ou au contraire un jeu ?

Passer d’un univers urbain à de la végétation, s’apparente plus à un voyage, une enquête car il faut que je sache à quoi ressemble, tel lieu, telle chose... Du coup j’enquêtais aussi comme les héros et pas que sur le mystère du Premier Miracle.

C’est un plaisir de passer d’un lieu à un autre, c’est aussi ce qui m’a plu dans le roman, les personnages avancent, ils ne s’attardent pas 15 ans dans un endroit. Il est vrai que du coup, on passe pas mal de temps à se documenter... Mais c’est très plaisant de faire des voyages immobiles, bien que je ne serais pas contre le fait de visiter les lieux que je ne connais pas. Faudrait que l’on demande avec Didier si Glénat serait d’accord pour nous organiser le périple !


La tentation était grande de concevoir l’album comme une sorte d’Indiana Jones. Vous avez choisi de rendre l’univers très contemporain. Est-ce difficile d’être original dans le genre fantastique et historique ?

Je me suis laissé porter par le roman et le scénario, je ne me suis pas obligé à... La mise en scène peut se permettre une certaine originalité, mais il faut garder à l’esprit que l’on raconte quelque chose qui doit être crédible. Je ne peux pas me permettre d’être trop original non plus, ce n’est pas le propos et je ne pense pas que cette aventure le permette vraiment. L’univers est très contemporain de toute façon, mais il y a quand même quelques flash-back, dont un où je me suis fait plaisir en faisant un clin d’œil à Indiana Jones, enfin plus précisément à Sylvanus Morley qui à inspiré Georges Lucas et Steven Spielberg lors de la création de leur personnage. On peut le retrouver case 8 planche 34 du tome 1..


Avez-vous pu vous déplacer afin de dessiner des lieux comme l’Université d’Oxford ou l’Hôtel de Cluny ?

Il y a effectivement certains lieux que je connais. La réalisation du premier tome a eu lieu pendant l’année 2020 du covid, il m’a été très compliqué de me déplacer, heureusement que j’avais déjà fait des photos lors de mes voyages précédents. J’ai aussi sollicité des amis qui bougent pas mal ou habitent sur place et qui m’ont fourni aussi de la documentation.



Benjamin Horwood et Karen Holt forment le duo du « Premier miracle ». Quelle fut votre principale inspiration pour les dessiner ?

Pour leur création comme je l’ai dit précédemment pour Karen, je n’avais pas la même vision que Gilles. Je la voyais brune, les cheveux plus courts, les yeux verts... Ça y est j’en entend qui disent que je voulais m’inspirer de mon épouse Béatrice, et bien non. J‘avais en tête un présentatrice TV qui se nomme Églantine
Émeyer. Comme vous pouvez le voir, nous n’avions aucun point commun dans notre vision avec Gilles. Après nous sommes
parti sur son idée, il avait en tête Rebecca Ferguson une actrice suédoise que je me suis approprié.
Pour Ben, il fallait un personnage estudiantin, un peu lunaire, beau mais pas trop, gauche... J’ai pensé à Topher Grace lors de la lecture du roman, donc je m’en suis inspiré pour le créer.


La scène du temple égyptien fait place à un certain envoûtement. Comment l’avez-vous conçu ?

Le lieu n’existant pas, c’était assez facile de le créer, d’autant que je l’avais bien visualisé lors de la lecture du roman. J’ai voulu me détacher de ce qui avait déjà pu être fait de part et d’autre par des historiens, dessinateurs... Je me suis laissé porter par mon imagination et par les besoins narratifs aussi, tout en gardant à l’esprit qu’il fallait que cela soit crédible. « Crédible » est mon mot pour ce diptyque, par là j’entends que l’on y croit, après la justesse historique c’est autre chose. Nous faisons de la fiction... Il y a du fantastique, de l’ésotérisme, donc on peut se permettre des choses...




Avez-vous abordé le tome 2 d’une façon différente du tome 1 ou au contraire il fallait une continuité ?

Non, pas de différence, l’histoire s’inscrit dans la continuité, vu que c’est un roman à la base. Je n’ai pas fait de coupure entre les deux tomes. L’envie d’avancer était toujours bien présente et il fallait aussi tenir les délais que nous nous étions fixés. J’avais envie de poursuivre l’aventure avec nos héros que sont Karen et Ben. J’ai passé de très bons moments en leur compagnie.


Le jaune très clair de l’Egypte ou bien le bleu foncé de l’Ecosse – les codes couleur sont choisis pour mieux accompagner le récit ?

Bien sûr, C’est à ça que sert la couleur. Il faut qu’elle serve la narration, qu’elle apporte un plus et c’est ce qu’a fait Elvire avec sa belle palette de couleur. Il y avait des infos dans le scénario et je lui donnais des recommandations lorsque j’avais des idées lors de la mise en scène. Elvire est suffisamment douée et aguerrie, j’ai souvent opté pour la carte blanche, pour voir comment elle allait interpréter mes pages. Elle s’en est vraiment très bien sortie. C’était pour moi un plaisir de les redécouvrir lorsque je les recevais. J’ai eu la même sensation que Gilles (dans sa postface) à mon égard « Merci à Olivier pour son engagement au long cours, son inventivité visuelle qui réussit l’exploit de me faire redécouvrir ce que je connais déjà. » à propos d’Elvire lorsque elle m’envoyait les pages en couleur. Je les attendais avec impatience. J’apprécie beaucoup le travail en équipe.


L’uchronie (Adolf Hitler) est un bon exercice pour un dessinateur ?

J’aime bien ce genre d’univers. L’uchronie nous permet de voyager dans un monde différent tout en ayant des repères de notre propre histoire. J’avais déjà traité de la Seconde Guerre mondiale dans d’autres albums, mais jamais ce personnage là et ses sbires. D’autant plus que, lorsque je travaillais sur ses pages, la guerre en Ukraine allait commencer... C’était assez étrange, de dessiner une période dite, passée, en Europe au XXème siècle, et de voir que ça allait malheureusement reprendre au XXIème siècle.


Pensez-vous réaliser un nouveau projet avec Gilles Legardinier et Didier Convard ?

J’aimerais bien poursuivre avec eux, pourquoi pas... L’avenir nous le dira. Pour le moment, Didier doit se reposer pour nous revenir en pleine forme. Il est vrai que notre collaboration a été des plus agréable. Par exemple, Gilles m’a laissé totalement libre dans ma reinterpretation et création des lieux de son roman et autres... Didier, quant à lui aussi a toujours été disponible, à l’écoute... Effectivement des collaborations comme celle-là, j’en redemande.

C’est d’ailleurs étonnant que vous me posiez cette question car dernièrement un de vos confrères pour BDzoom, finissait sa chronique par « Pouvons-nous espérer que le duo d’auteurs s’approprie ces héros pour proposer une suite inédite à ce diptyque ? » L’idée est pour le moins séduisante.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire